Athènes envisage de commander des Rafale F4 pour tenir tête aux futurs Eurofighter de la Turquie
Très cliente du Rafale, la Grèce envisage désormais d’élargir la flotte avec un nouveau lot au standard F4. L’idée est simple : conserver l’avantage au-dessus de l’Égée alors que la Turquie avance sur un accord pour l’achat d’Eurofighter accompagnés de missiles Meteor. Ce mouvement s’inscrit dans une trajectoire connue à Athènes : tendre vers environ 200 avions de combat modernes, retirer progressivement les Mirage 2000-5 – potentiellement pour l’Ukraine – et intégrer le F-35A sans créer de trou capacitaire.
L’intérêt du F4 tient d’abord à la connectivité. Le Rafale combine le Link 16 et une liaison propriétaire pour coordonner les appareils d’une même patrouille. Cette double voie vise à maintenir les échanges malgré des brouillages régionaux. Concrètement, les équipages partagent plus vite les pistes de détection, de classification et de ciblage, ce qui accélère la construction du tableau de situation et avance le moment de décision.
Les capteurs franchissent aussi un palier. Le radar à antenne active (AESA) bénéficie de traitements étendus et peut suivre/verrouiller des cibles terrestres mobiles à longue distance, utile pour la frappe en profondeur et le contrôle tir air-sol. Le capteur optronique infrarouge de poursuite (IRST) de nouvelle génération améliore la détection discrète des plateformes à faible signature, un atout lorsque l’on limite ses émissions (EMCON). S’ajoutent le viseur de casque Scorpion HMD et la suite d’autoprotection SPECTRA pour renforcer la survivabilité à courte et moyenne portée.
Une escadrille de 24 Rafale opérationnelle
Côté armement, le MICA NG arrive avec deux autodirecteurs (IR passif et radar AESA). Selon l’industriel, son enveloppe de tir couvre 360° et sa portée dépasse d’environ 40 % celle du MICA en service. Le couple AESA et MICA NG élargit les fenêtres de tir au-delà de la portée visuelle (BVR) et resserre la « no-escape zone », forçant l’adversaire à passer plus tôt en défensif et à dégrader sa manœuvrabilité.
Sur le plan opérationnel, le F4 offre des gains immédiats à la force aérienne grecque (Polemikí Aeroporía). Sous EMCON, l’IRST et le HMD facilitent l’acquisition passive puis un tir opportuniste, pendant que SPECTRA gère les menaces électromagnétiques. En supériorité, le Rafale agrège des pistes via LINK 16 et la liaison propriétaire avec les F-16 Viper et, demain, les F-35A pour bâtir une situation reconnue air-mer robuste, intégrée à l’image opérationnelle commune (IOC/COP).
Reste la mise en musique : standardiser autour des Rafale F4, F-16V et F-35A favorise l’interopérabilité OTAN, la maintenance et les stocks. La flotte actuelle compte déjà 24 Rafale F3-R issus de contrats totalisant environ 3,5 milliards d’euros auprès de la France et Dassault Aviation (18 appareils signés en 2021 pour près de 2,5 milliards d’euros puis 6 neufs en 2022 pour environ 1,09 milliard d’euros), un socle qu’il s’agit désormais de faire monter en puissance. Avec l’appui industriel français et les moyens de Tanagra, tout l’enjeu sera d’aligner les calendriers et d’éviter les ruptures… pendant que la modernisation turque poursuit, elle aussi, sa marche.
Photo © Colin Cooke