Dassault Aviation en passe de décrocher une commande historique de 114 Rafale en Inde ?
L’armée de l’air indienne se prépare à un important renforcement de ses capacités. Selon The TImes of India, elle souhaite acquérir 114 avions de chasse Rafale supplémentaires auprès de la France. Ce projet, baptisé MRFA (Multi-Role Fighter Aircraft), pourrait devenir l’un des plus gros contrats jamais signés pour l’avion de Dassault Aviation.
L’Indian Air Force (IAF) plaide pour que cet achat se fasse via un accord direct entre les deux gouvernements (government-to-government), plutôt qu’à travers un long appel d’offres international. Cette formule dite « G2G » permettrait de gagner plusieurs années dans le calendrier, tout en assurant une négociation plus rapide sur les aspects techniques et financiers. L’idée est d’aller vite pour répondre à un besoin jugé urgent par les militaires indiens.
Un déficit capacitaire qui pousse à agir vite
Car le déficit d’avions de combat devient préoccupant. Aujourd’hui, l’IAF dispose de 31 escadrons, chacun comptant entre 16 et 18 avions. C’est bien en dessous du format officiel de 42,5 escadrons, estimé nécessaire pour affronter simultanément la Chine et le Pakistan. Et la situation risque de s’aggraver : le mois prochain, les derniers MiG-21, en service depuis plusieurs décennies, seront retirés, faisant tomber le total à 29 escadrons. Ce serait un niveau historiquement bas pour l’aviation indienne.
Ce contexte tendu s’est renforcé après l’opération Sindoor, menée du 7 au 10 mai 2025 contre des cibles pakistanaises. Les Rafale, livrés à l’Inde entre 2020 et 2022, ont été employés pour des frappes à longue portée. Islamabad affirme avoir abattu plusieurs avions indiens, dont trois Rafale, avec des chasseurs chinois J-10 équipés de missiles PL-15 pouvant frapper à plus de 200 kilomètres. New Delhi conteste cette version et affirme que ses Rafale ont rempli leurs missions avec succès.
Le choix de l’appareil français s’explique aussi par une logique de continuité. Les bases aériennes d’Ambala et Hasimara sont déjà équipées pour accueillir et entretenir le Rafale. Par ailleurs, la marine indienne (Indian Navy) attend la livraison de 26 Rafale Marine à partir de 2028 pour équiper son porte-avions INS Vikrant. Disposer d’un même modèle pour l’armée de l’air et la marine permet de simplifier la formation des pilotes, de réduire les coûts de maintenance et de limiter la diversité des pièces de rechange.
Entre Rafale, F-35 et Su-57 : l’Indian Air Force explore ses options
Sur le plan industriel, la coopération franco-indienne est déjà engagée. Dassault Aviation a signé un partenariat avec le groupe indien Tata pour fabriquer localement les fuselages du Rafale. Safran devrait également s’associer à l’Inde pour développer le moteur du futur avion de combat national, l’AMCA (Advanced Medium Combat Aircraft), dont l’entrée en service est prévue à l’horizon 2035.
Un point de négociation reste toutefois délicat : l’accès au code source du Rafale. L’Inde souhaite obtenir ces données pour intégrer ses propres systèmes d’armes et améliorer l’autonomie de sa défense. Les industriels français – Dassault, Safran, Thales, MBDA – redoutent qu’une telle ouverture technologique ne compromette leur savoir-faire et exigent des garanties strictes avant d’envisager cette option.
Le dossier s’inscrit aussi dans un environnement régional tendu. La Chine prévoit de livrer prochainement au Pakistan au moins 40 chasseurs furtifs J-35A, ce qui modifierait l’équilibre aérien en Asie du Sud. Pour ne pas se laisser distancer, l’IAF étudie aussi l’achat de deux ou trois escadrons d’avions de 5e génération, comme le F-35 américain ou le Su-57 russe, en attendant que l’AMCA devienne opérationnel.
Si New Delhi confirme cet achat, il pourrait s’agir d’un contrat record pour le Rafale et d’un signal fort sur le plan stratégique. La France et l’Inde renforceraient ainsi leur partenariat militaire, à un moment où la stabilité régionale est mise à rude épreuve par la rivalité entre grandes puissances et les tensions croissantes avec Islamabad et Pékin.
Photo © Saurav Jain