CA-1 Europa : le pari de la pépite Helsing pour une puissance aérienne à coût maîtrisé
Helsing vient de lever le voile sur CA-1 Europa, un drone de combat autonome (UCAV) présenté en maquette grandeur nature dans les ateliers de sa filiale Grob Aircraft, en Bavière. L’ambition est claire : faire voler un premier exemplaire en 2027 et disposer d’une version opérationnelle d’ici quatre ans, en s’appuyant sur un réseau de partenaires européens pour sécuriser la production et la chaîne logistique.
D’emblée, le positionnement est assumé : CA-1 Europa vise la « masse intelligente », cette combinaison de plateformes attritionnables, modulaires et produites en série, capables d’opérer seules, en essaim, ou en appui d’avions pilotés. L’appareil, monoréacteur, adopte une configuration furtive — fuselage anguleux, prises d’air latérales, empennage en V — pensée pour évoluer à des vitesses haut-subsoniques. Peu de détails techniques filtrent à ce stade, sinon un gabarit situé dans la catégorie des 3–5 tonnes et l’emport d’armements en soute interne.
L’originalité du projet tient surtout au logiciel. Helsing intègre son pilote IA « Centaur » et un système d’exploitation de mission (« Mission OS ») ouvert, conçu pour accueillir capteurs, systèmes d’autoprotection, effecteurs et applications tierces. L’industriel prévoit également un système de commandement et de contrôle (C2) destiné à planifier, superviser et coordonner des missions autonomes complexes. Centaur a déjà été éprouvé en vol sur Gripen E, en partenariat avec Saab ; un jalon important pour la coopération homme-machine et la conduite d’engagements collaboratifs.

L’atout Grob Aircraft
Sur le plan industriel, le développement, la fabrication et les essais sont colocalisés chez Grob Aircraft, spécialiste des structures composites. Cette intégration verticale doit accélérer les cycles et préserver la souveraineté européenne — un argument martelé par Helsing dans un contexte où la dépendance à des capacités non européennes reste un sujet sensible. L’entreprise promet des coûts « fractionnés » par rapport à un chasseur piloté, sans avancer pour l’instant de cible budgétaire.
Le marché visé est vaste : renseignement, reconnaissance, guerre électronique, frappes de précision dans la profondeur. En filigrane, l’enjeu est celui de la reconstitution de la masse aérienne en Europe, sans explosion des budgets. Plusieurs forces aériennes — à commencer par la Luftwaffe — examinent déjà des solutions de type « loyal wingman » pour épauler Eurofighter, futures variantes de guerre électronique ou F-35. CA-1 Europa arrivera dans un paysage concurrentiel où coexistent concepts européens et propositions venues d’ailleurs.
Reste l’épreuve des faits. Tenir le jalon du premier vol, sécuriser un moteur et une chaîne d’approvisionnement, démontrer la robustesse de l’autonomie avec l’humain dans la boucle : autant d’étapes déterminantes avant tout contrat majeur. Si l’exécution suit le tempo annoncé, CA-1 Europa pourrait devenir l’une des cartes européennes les plus crédibles pour conjuguer souveraineté, agilité et rapport coût/effet. Pour Helsing, jeune champion du logiciel de défense qui se fait constructeur, le passage du mock-up à la série fera foi. Pour les États européens, c’est peut-être l’opportunité d’ancrer dans le réel une stratégie de puissance aérienne à coût maîtrisé.
Photo © Helsing