Pour sa lutte anti-drones, l’Inde mise sur l’arme laser HELMA-P de la pépite française CILAS
L’Inde et la France poussent un pion discret mais stratégique dans la défense anti-drones. Axiscades et la pépite française CILAS (filiale de MBDA et Safran Electronics & Defense) viennent de signer un protocole d’accord (MoU) pour proposer aux forces indiennes une capacité laser anti-drones fondée sur le système HELMA-P, avec conception système et intégration locale côté indien. Au-delà du symbole, l’accord colle à deux priorités de New Delhi : neutraliser des essaims de drones à bas coût et « indianiser » les briques critiques (maintenance, capteurs, C2).
HELMA-P : un effecteur laser éprouvé, précis et économique
HELMA-P (High Energy Laser for Multiple Applications-Power) n’est pas une promesse sur plan : c’est un effecteur de quelques kilowatts, à tir électrique, déjà éprouvé, conçu pour chauffer des points sensibles (optiques, batteries, structure) et imposer la chute de mini/micro-UAS. Son intérêt opérationnel tient autant à la précision qu’à l’économie : pas de stocks de munitions, un coût marginal par tir de quelques euros, et une signature réduite, sans panache, utile en environnement dense. Le système s’interface avec radars, capteurs optiques ou acoustiques, et s’insère dans des chaînes C2 existantes, au sol, sur véhicules ou depuis un bâtiment naval.
Côté références, la Marine nationale et la Direction générale de l’armement (DGA) ont validé l’emploi « en conditions réelles » : neutralisations réussies depuis la frégate de défense aérienne (FDA) Forbin en 2023, après des campagnes à terre à Biscarrosse à la DGA-Essais de missiles. Ces jalons, rendus publics par CILAS (Compagnie industrielle des lasers) et par le ministère des Armées, documentent une efficacité en conditions dégradées (pluie, embruns), point souvent critique pour les lasers. L’arme a par ailleurs été mobilisée dans le dispositif de lutte anti-drones (LAD) autour des Jeux de Paris 2024, illustrant l’intérêt dual défense/sécurité intérieure.
Le laser pour compléter l’arsenal anti-drones indien
Pour l’Inde, le calendrier est favorable. Les doctrines LAD évoluent vite, au rythme des conflits où des drones grand public deviennent des munitions de circonstance. Les autorités indiennes testent déjà des solutions cinétiques et de guerre électronique ; la brique laser vient compléter ce triptyque, en offrant une réponse soutenable contre des vagues de cibles bon marché. L’accord prévoit une variante montée sur véhicule, pensée pour le rythme des forces terrestres indiennes.
La trajectoire française, elle, se prolonge vers la « très haute » puissance. Cet été, la DGA a notifié à un consortium composé de MBDA-Safran-Thales-CILAS un démonstrateur multi-faisceaux de plusieurs dizaines de kilowatts (SYDERAL), première marche vers le traitement de menaces plus dures à l’horizon 2030. Cette dynamique crédibilise l’offre export : elle montre une filière capable d’échelonner ses puissances selon les usages, du point défense urbain au naval.
S’il franchit l’épreuve des démonstrations en environnement indien (chaleur, poussière, altitude), le système HELMA-P pourrait devenir un « standard utile » de la bulle de protection rapprochée. Et un marqueur d’une coopération indo-française désormais aussi logicielle que matérielle – de l’architecture système au dernier kilowatt sur la cible.
Photo © Safe Cluster