Le système de combat aérien du futur (SCAF), officiellement baptisé New Generation Weapon System (NGWS), fédère la France, l’Allemagne et l’Espagne autour du développement d’un démonstrateur de chasseur de 6ᵉ génération (NGF) et de ses drones d’appui. Piloté en France par Dassault Aviation, la Direction générale de l’Armement et l’armée de l’Air et de l’Espace, ce projet vise non seulement à concevoir un nouvel avion de combat, mais surtout à construire un véritable « système de systèmes », combinant plateforme habitée, essaims de drones et cloud de combat interconnecté, pour une mise en service prévue vers 2040.
Un écosystème industriel en plein essor
« Notre projet avance avec ambition », a déclaré, la semaine dernière, l’ingénieur en chef de l’armement Philippe Koffi lors du FCAS Summit de Londres. Deux ans après le lancement de la Phase 1B, le programme réunit déjà « plus de 3 000 ingénieurs issus d’environ 144 entreprises », « des grands groupes aux start-ups ». Cette mobilisation a abouti à « plus de 800 livrables, et plusieurs revues critiques ont été franchies », démontrant une excellence technologique alliée à une capacité à produire des résultats concrets. Outre la finalisation progressive de la forme du démonstrateur NGF, un prototype de drone ravitailleur – ou « remote carrier » – doit effectuer ses premiers essais en vol avant la fin de la décennie.

Vers une architecture collaborative
Le NGF ne volera pas seul : il sera le cœur d’un réseau intégré de drones légers et lourds, tous reliés par un « cloud de combat aérien ». Le général Jean-Luc Moritz, directeur de projet opérationnel sur le SCAF, insiste : « Nous devons parvenir au meilleur chasseur, aux meilleurs porteurs télépilotés et au meilleur “combat cloud” ». L’objectif est d’orchestrer un système cohérent où chaque élément, habité ou non, joue un rôle complémentaire. Comme le souligne Jean-Luc Moritz : « Un avion de chasse a besoin de manœuvrabilité pour combattre et survivre. Il lui faut la furtivité et des armements. Notre système doit apporter une masse de combat, pour saturer, tromper, leurrer et dissuader. Il nous faut trouver l’équilibre subtil entre moyens pilotés et non-pilotés, ce qui est très complexe. » Dès septembre, les trois nations recevront « les trois architectures les plus prometteuses » pour arbitrer la configuration optimale du NGF et de ses drones.
L’intelligence artificielle au cœur du NGWS
L’IA est l’un des piliers du programme : « L’IA sera l’une des caractéristiques principales de cette capacité de sixième génération : elle garantira que les données circulent au bon moment et au bon endroit », explique Philippe Koffi. En plus d’accélérer le C2 (commandement et contrôle) et la prise de décision, l’intelligence artificielle fusionnera les informations issues des capteurs des drones et du NGF pour offrir une conscience situationnelle partagée. Un « assistant virtuel piloté par l’IA » aidera le pilote en cockpit, tandis que l’opérateur pourra devenir « un “Shazam” dans le domaine de la guerre électronique », grâce à la capacité de l’IA à identifier et neutraliser en temps réel les menaces électroniques.
Le passage en Phase 2, attendu « à la mi-2026, nous éloignant ainsi des activités initiales », marquera le lancement du développement complet et de l’assemblage des démonstrateurs, pour un premier vol d’essai en 2029. La Phase 3, à partir de 2030, sera dédiée aux campagnes d’essais en vol et à la maturation des systèmes opérationnels en vue d’une entrée en service vers 2040. Sur la scène mondiale, ce modèle de force mixte trouve des échos : le Global Combat Air Programme (GCAP) du Royaume-Uni, de l’Italie et du Japon et le NGAD/Collaborative Combat Aircraft des États-Unis partagent la même vision « avion + drones + cloud ».
Feuille de route française et retombées anticipées
Si le NGWS cible les menaces du début des années 2040, la France planifie des avancées plus rapides : « Le NGWS vise les menaces du début des années 2040, mais il existe une feuille de route pour l’aviation de combat [en France] afin de répondre aux menaces avant cela, » souligne Jean-Luc Moritz. Une version F5 standard du Rafale entrera en service en 2030, et un drone de combat (UCAV) suivra dès 2033. Enfin, Paris ambitionne d’obtenir « des retombées technologiques [du NGWS] dans les années 2020 et 2030 » pour bénéficier dès maintenant des innovations, avant l’arrivée du NGF complet.
Photo © Dassault Aviation – V. Almansa