À Dubaï, ce n’est pas un simple « deal de drones » qui se discute entre General Atomics et l’Arabie saoudite, mais une remise à plat de la manière dont le Royaume entend surveiller et défendre son territoire. L’industriel américain confirme à Breaking Defense négocier un paquet pouvant aller jusqu’à 130 MQ-9B à décollage court (Short Take-off and Landing aircraft) et 200 drones Gambit de type CCA (collaborative combat aircraft). Sur le papier, cela représente une flotte d’environ 330 appareils, pensée dès le départ pour voler en réseau et épauler les avions de combat.
Le choix du MQ-9B n’est pas anodin. Ce dérivé du Reaper a été conçu pour répondre aux standards OTAN et voler dans l’espace aérien civil grâce à des systèmes « detect and avoid » et une cellule durcie. Il peut rester plus d’une journée en l’air, emporter radars, capteurs électro-optiques, charges de guerre électronique ou modules de lutte anti-sous-marine. De quoi couvrir à la fois les frontières terrestres, les approches maritimes et les infrastructures pétrolières, cœur de l’économie saoudienne.
Vitrine technologique ou laboratoire à risques pour Washington ?
Le Gambit joue dans un autre registre : celui du drone ailier. General Atomics a récemment testé un contrôle depuis un cockpit de F-22 via une simple tablette, l’autonomie embarquée gérant trajectoires et capteurs. L’idée n’est plus seulement de « voir loin », mais de saturer l’adversaire par des essaims coordonnés, tout en limitant l’exposition des équipages.
En arrière-plan, Riyad poursuit un objectif clair : rapatrier une partie de la valeur sur son sol. Le volume envisagé rend crédible l’assemblage local, la maintenance lourde et l’intégration de capteurs ou d’armements développés dans le Royaume, en ligne avec Vision 2030.
Reste une question sensible, à Washington comme dans le Golfe : jusqu’où exporter des capacités autonomes conçues pour opérer en masse, dans une région déjà saturée de drones chinois, turcs et iraniens ? Si le contrat se concrétise, l’Arabie saoudite deviendra à la fois vitrine technologique américaine et terrain d’essai grandeur nature pour la guerre aérienne collaborative.
Photo © General Atomics