Les Pays-Bas passent à l’offensive sur la frappe longue portée. Tout en achetant le Tomahawk américain, La Haye lance un programme national de missile de croisière, moins coûteux et produit en série, pour ne plus subir un marché mondial saturé et dépendant des priorités d’autrui.
Au salon NEDS de Rotterdam, le secrétaire d’État à la Défense Gijs Tuinman a directement mis la pression sur l’industrie néerlandaise : il lui donne six mois pour présenter un concept de missile inspiré du Tomahawk. Il veut une arme de précision longue portée, simple, robuste, industrialisable vite et en grand nombre, capable de frapper loin là où les drones montrent leurs limites. Tuinman insiste : cette capacité doit naître sur le sol néerlandais afin de permettre des mises à jour continues et des cycles d’innovation rapides, sans attendre les calendriers américains ou britanniques.
Frapper loin et produire chez soi : le pari stratégique de l’industrie néerlandaise
En parallèle, La Haye verrouille le volet opérationnel. Elle achète jusqu’à 175 Tomahawk pour 2,19 milliards de dollars (1,9 milliard d’euros). La marine (Koninklijke Marine) intégrera ces missiles sur les quatre frégates de la classe De Zeven Provinciën à partir des silos verticaux Mk 41. Un tir d’essai du Zr.Ms De Ruyter au large de Norfolk a déjà validé l’intégration. Les premiers Tomahawk doivent rejoindre la flotte à partir de 2028. Pour les futurs sous-marins Orka, les Pays-Bas misent, eux, sur le programme européen Joint Strike Missile – Submarine Launched, attendu autour de 2032.
Derrière ces choix, se dessine une ligne stratégique claire : sécuriser une capacité de frappe dans la profondeur tout en densifiant la base industrielle nationale. Si l’industrie néerlandaise réussit à proposer un « Tomahawk abordable » exportable, La Haye pourrait peser bien au-delà de son poids militaire et relancer le débat européen sur une filière commune de missiles longue portée, coincée entre urgence opérationnelle et tentation du chacun pour soi.
Photo © Koninklijke Marine