Avec 40 000 tirs en Ukraine, le CAESAr 8×8 de KNDS France confirme son efficacité
Depuis avril 2023, 19 canon automoteurs CAESAr 8×8 fournis par le Danemark ont cumulé plus de 40 000 obus tirés sur le front ukrainien, soit une moyenne de 2 100 coups par pièce, selon un communiqué de presse de KNDS France. Ce chiffre illustre à la fois l’intensité du conflit et les capacités tactiques du système français, confronté à la double pression de menaces innovantes (drones FPV et Shahed) et de l’usure rapide de ses tubes. Parallèlement, l’industriel doit accélérer sa production pour honorer les commandes de la République tchèque tout en constituant une réserve pour l’effort de guerre en Ukraine.
Bilan opérationnel et adaptations tactiques
Le CAESAr 8×8, doté d’une centrale inertielle, d’un radar de bouche et d’un calculateur balistique, sert la précision et la réactivité : en quatre mois, chaque véhicule a tiré entre 1 800 et 2 400 obus, avec un seul cas de perte physique. Les artilleurs ukrainiens rapportent des cadences de 60 à 90 tirs quotidiens, tout en maintenant une dispersion maîtrisée.
Sur un théâtre où jusqu’à 300 drones FPV peuvent survoler une position chaque jour et où les frappes de drones-suicide Shahed frappent à 1 000–1 500 km, les équipages ont bricolé des protections « terrain ». Cages métalliques autour de la cabine, casiers de munitions blindés, filets de camouflage artisanal : ces modifications de fortune témoignent de la modularité du CAESAr et de sa réceptivité aux retours d’expérience. Elles contribuent aussi à la survie du système face à la menace aérienne de basse altitude, souvent qualifiée de « défi numéro 1 » par les officiers ukrainiens.
Défis industriels et montée en cadence
En parallèle, la République tchèque a conclu en septembre 2021 un contrat de 335 M€ pour 52 CAESAr 8×8 (40 % produit localement via Tatra), complété en 2022 par 10 unités pour 73 M€, destinées à remplacer d’ici 2026 les anciens Dana ZTS de 152 mm.
Pour concilier ces échéances et soutenir l’Ukraine, KNDS France a fait passer sa production de 2 à 6 CAESAr par mois en 2022–2024 ; l’objectif est désormais de 12 unités mensuelles en 2025. Cet effort industriel vise à éviter toute rupture de stock et à garantir la disponibilité des systèmes en opération.
Un point de vigilance demeure : l’usure des tubes. Le rapport parlementaire de Jean-Louis Thiériot et Matthieu Bloch souligne que, sous cadences extrêmes et tirs à longue portée, la durée de vie des tubes peut chuter bien en-dessous des 7 000-8 000 coups observés sur d’autres systèmes comme le Bohdana. Il insiste sur l’urgence de créer une filière nationale de régénération rapide des tubes pour préserver la performance et la disponibilité opérationnelle à long terme.
Le CAESAr 8×8 confirme son statut de système robuste et adaptable, capable de soutenir un rythme de feu inédit sur le front ukrainien tout en évoluant pour faire face aux drones. Cependant, entre montée en cadence de production et régénération des tubes, KNDS France se trouve à un tournant : l’équilibre entre réponses tactiques immédiates et soutien industriel durable déterminera la pérennité de cette « déesse de la guerre » dans les conflits de demain.